Le développement de logiciels libres s’inscrit dans une économie particulière, qui s’oppose au modèle répandu de « vente » de logiciels via la vente de contrats de licences d’utilisation.
Si aucune licence n’est vendue, comment assurer des revenus réguliers à ses contributeurs, et par conséquent la viabilité du projet à long terme ?
La vente de prestations de développement pour corriger ou faire évoluer un logiciel libre est un modèle économique très répandu. Des sociétés de services, intégrées à la communauté des développeurs d’un projet, vendent leurs prestations pour répondre à des besoins clients. Le travail réalisé est cependant vu dans une logique de co-édition logicielle, où le besoin immédiat du client est à faire cohabiter avec la communauté utilisateurs et de développeurs du logiciel.
Cette logique a toujours existé, logiciel libre ou non. Cependant la spécificité de l’économie du logiciel libre apporte certains avantages:
- les clients qui participent au financement de ces développements répondent à leur besoin de correction ou d’évolution immédiat, mais s’inscrivent aussi dans une logique à plus long terme d’amélioration global du logiciel. La dépendance envers un logiciel particulier existe, mais la dépendance envers un fournisseur en particulier est contenue ;
- plusieurs clients avec des besoins proches auraient généralement intérêt à mutualiser leurs capacités de financement pour commander de meilleurs prestations, ou simplement en commander plus.
Ce dernier point, la mutualisation du financement, nous semble être assez peu développé, en particulier en France.
Le « financement participatif » ou crowdfunding parle pourtant bien au grand public. Mais il s’agit ici d’un schéma différent: les co-financeurs sont rarement directement des particuliers, plutôt des entreprises publiques ou privées. Les attendus de part et d’autres ne sont pas forcément les mêmes et les sommes mises en jeu rarement du même ordre. L’idée serait ici de faire évoluer la commande classique de prestation intellectuelle en une commande partagée entre plusieurs acteurs.
Certains acteurs de la communauté QGIS utilisent ce mode de financement de manière ponctuelle. Généralement pour compléter un financement ou un auto-investissement déjà établi, parfois comme seule source de financement. Il concerne principalement l’ajout de nouvelles fonctionnalités au cœur de QGIS.
Une présentation aux dernières Rencontres des Utilisateurs Francophones de QGIS illustre cependant que ces campagnes, sauf rares exceptions, ne sont pas directement rentables en soi. On note aussi que ce mode de financement est peu développé et peu suivi en France, alors même que plusieurs signes indiquent une très forte utilisation de QGIS dans le pays.
Peut être existe-t-il en France, plus qu’ailleurs, des obstacles culturels et/ou administratifs qui empêchent des potentiels financeurs de mutualiser leurs besoins. Pour bon nombre d’entreprises publiques ou privées, la logique de co-financement pourrait par exemple s’apparenter à un « don », puisqu’il est difficile de garantir les résultats de la campagne.
Une logique de club d’utilisateurs / financeurs qui se réunissent pour échanger sur leurs besoins et leurs possibilités de financement semble aussi manquer. Cette logique semble très bien fonctionner dans d’autres pays ou dans d’autres communautés.
Mais avant de savoir comment régir une telle organisation, il nous semble aujourd’hui important de déterminer dans un premier temps si des bonnes volontés existent pour rendre reproductible et pérenne un mécanisme de mutualisation des financements pour QGIS et plus généralement pour les outils libres de cartographies.
Oslandia sera présent aux prochaines conférences du domaine (qui restent à déterminer dans le contexte sanitaire particulier actuel) pour réunir ces bonnes volontés et propose d’y mener les discussions sur des fonctionnalités manquantes de QGIS en vue d’un financement mutualisé.
N’hésitez pas à vous manifestez si vous êtes intéressés par cette démarche.